Malheureusement, trop peu d'entre nous se soucient de cette fameuse prévoyance lorsque justement " tout va bien ". Les plus jeunes se demandent d'ailleurs peut-être de quoi on parle ? Dans quelle situation sommes-nous couverts? Quelles sont les garanties ? Est-ce obligatoire ou non ? Quel contrat choisir en fonction de son statut ?
Et vous d’ailleurs, savez-vous comment vous êtes protégés ?
Une aide précieuse en cas de coup dur !
La prévoyance… En effet, cela vous rappelle vaguement quelque chose aperçue dans la grande liasse de papiers accumulés pour occuper votre journée " paperasse " mensuelle. Et pour cause, il s’agit d’un n-ième contrat d’assurance. Souvent gérés par les mêmes organismes que la mutuelle santé ou la retraite, ces contrats bien spécifiques permettent de protéger économiquement le vétérinaire et sa famille lors d’accidents de la vie, professionnelle mais aussi personnelle, l’empêchant d’exercer à plus ou moins long terme son métier.
Les différents incidents pris en charge par les contrats de prévoyance sont : les arrêts de travail, l’invalidité professionnelle partielle ou totale, le décès.
Selon les conditions définies par le contrat de prévoyance souscrit au moment de l’accident, le vétérinaire percevra des indemnités permettant d’assurer le paiement des charges fixes liées à son activité (prêts bancaires, loyer…) mais aussi de compenser la perte de revenus professionnels, en tenant compte de ses besoins à l’instant t, notamment en fonction de sa situation familiale (enfants à charge, par exemple). Dans certains cas, il pourra également être exempt du paiement de certaines cotisations obligatoires.
Deux salles, deux ambiances…
Bien que tout vétérinaire soit ainsi protégé de manière universelle et obligatoire, les conditions d’indemnisation diffèrent selon leur statut. En effet, un vétérinaire salarié n’aura pas les mêmes garanties qu’un vétérinaire libéral.
Les termes de la prévoyance des vétérinaires salariés, après négociation par les partenaires sociaux, sont inscrits dans la convention collective [1]. Depuis peu, ces garanties ont même été fusionnées entre les vétérinaires salariés et les ASV. Sont couverts : les arrêts de travail en complément des prestations de l’assurance maladie, l’incapacité de travail partielle ou permanente et le décès. Différents organismes privés sont à même de gérer ces contrats de prévoyance. Bien souvent, le gestionnaire de la mutuelle d’entreprise est également celui qui a à charge la prévoyance.
Du côté des vétérinaires libéraux, la prévoyance est gérée par la CARPV (Caisse Autonome de Retraite et Prévoyance pour Vétérinaires), organisme de droit privé avec une mission de service public à but non lucratif. Trois niveaux de protection sont possibles : A (formule minimum obligatoire), B ou C [2]. Le régime obligatoire ne couvre que les cas d’invalidité ou de décès. Lors d’arrêt de travail, aucune indemnité n’est donc versée par la CARPV. En cas d’arrêt de plus de 6 mois, un vétérinaire libéral ayant souscrit à la formule de base ne pourra qu’espérer une éventuelle exonération partielle des cotisations pour la retraite de base.
Heureusement, depuis 2021, tous les professionnels libéraux (dont les vétérinaires) adhérents à la CNAVPL (Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse des Professions Libérales) ont tout de même obtenu, le versement d’indemnités journalières par la CPAM (Caisse Primaire d’Assurance Maladie) lors des premières semaines d’un arrêt maladie.
Concrètement : quelles sont les garanties proposées par le régime obligatoire ?
Si effectivement, les conditions d'ouverture de droits sont différentes entre un vétérinaire salarié et un vétérinaire libéral, le montant et la durée de versement des indemnités le sont également.
Comme évoqué précédemment, aucune indemnité n'est versée par la CARPV au vétérinaire libéral lors d'un arrêt de travail. Dès le 4ème jour et lors des trois premiers mois, l’aide de la CPAM lui permettra de conserver environ 50% de son salaire. Passée cette période, il ne percevra plus aucune aide financière.
En revanche, un vétérinaire salarié obtiendra des indemnités journalières à partir du 1er jour d'arrêt en cas de maladie professionnel et du 11ème jour d'arrêt en cas d’accident survenu dans la sphère privée et ce, pendant 3 ans maximum. Cette compensation financière à l'arrêt de l’activité professionnelle provisoire est assurée conjointement par la CPAM et la prévoyance. Sur la base des versements de la CPAM, la prévoyance complètera jusqu'à atteindre 80% du salaire de référence.
Lorsque l’incapacité de travail se prolonge et que le professionnel ne peut plus exercer pleinement son métier de manière définitive, on parle alors d'invalidité. L'invalidité peut être partielle (à partir de 66% d'incapacité à exercer son travail) ou totale (100% d'incapacité). Quel que soit son statut, le professionnel bénéficiera d’une rente : annuelle pour les libéraux et mensuelle pour les salariés. Le professionnel sera aussi exempté du paiement de certaines cotisations (lors d’invalidité de plus d’un an pour les vétérinaires libéraux !).
Enfin, en cas de décès, trois prestations sont garanties par les contrats de prévoyance : le capital décès, la rente éducative pour les enfants restants à charge au moment du décès et la rente au conjoint.
Jusqu’alors, cette dernière ne pouvait être versée qu’au conjoint marié non séparé de corps. Depuis 2011, la CARPV accorde également cette rente aux conjoints liés par un pacte civil (PACS) depuis au moins deux ans. Attention donc au concubinage qui n’est pas reconnu aux yeux de la prévoyance.
Lors de décès, il est également important de penser aux conditions encadrant la reversion permettant au conjoint survivant de toucher une partie de la retraite du défunt. Rappelons que dans ce cadre, seul le mariage est reconnu.
Tableau 1 : récapitulatif des indemnités de prévoyance de base d'un vétérinaire selon son statut [1][2]
Les prévoyances complémentaires à ne pas sous-estimer
Selon les situations, les garanties offertes par les contrats de prévoyance peuvent paraître insuffisantes pour compenser une perte d'activité professionnelle. C'est pourquoi il est intéressant d'étudier précisément sa couverture dès l'entrée dans la vie professionnelle mais aussi de l'adapter lors de l'occurrence de certains événements professionnels (changement de mode d'exercice, association, achat de locaux, emploi d'un salarié...) mais aussi personnels (mariage, naissance d'un enfant, prêts bancaires personnels...).
Les vétérinaires libéraux ont notamment la possibilité d'adhérer aux formules non obligatoires de la CARPV (B ou C) et d'ainsi augmenter le montant des prestations. Pour une formule plus personnalisée, des prévoyances complémentaires existent et sont accessibles quel que soit son statut. Cependant, il est vrai que la souscription à ces contrats représente un coût supplémentaire au financement de la prévoyance de base et cela peut freiner certains professionnels qui considèrent cette adhésion comme une charge fixe de plus. Or, il est tout de même possible d'en tirer certains avantages fiscaux réduisant ainsi la surcharge financière des prévoyances complémentaires. Comme tout investissement, il est préférable de se faire accompagner par un conseiller en prévoyance afin de trouver la formule la plus adaptée à sa situation personnelle.
Les principaux points sur lesquels être attentifs pour une protection optimale sont par exemple :
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évaluer la durée des franchises notamment lors d'exercice seul ou en libéral. Pour rappel, la franchise de la formule A de la CARPV lors d'invalidité est d’un an ;
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penser à compter dans les charges fixes professionnelles le coût d'un remplaçant salarié en cas d'arrêt de travail temporaire ;
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calculer une rente d'un montant suffisamment élevé permettant de subvenir au financement de son quotidien, et ce jusqu'à la retraite lors d'incapacité de travail partielle ou complète ;
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couvrir vos ayants-droits notamment en présence d'enfants ou de conjoint, en particulier si ce dernier ne travaille pas et/ou si vous n'êtes pas unis par le mariage. En effet, seul le régime matrimonial est officiellement reconnu pour le versement de certaines prestations.
Sujet complexe et parfois même peu réjouissant, être couvert par une bonne prévoyance est pourtant essentiel à un exercice professionnel serein. Pour souscrire au contrat le plus adapté, il faut savoir identifier ses besoins (qui évoluent au cours de de la vie) mais aussi évaluer les risques liés à son exercice quotidien et à son environnement de travail. C'est un métier, mais ce n'est pas le nôtre, donc n'hésitez pas à vous faire accompagner et conseiller par des professionnels.
Anne-Sophie Richard,
Vétérinaire
Ressources documentaires et bibliographiques :
[1] Convention collective nationale des cabinets et cliniques vétérinaires. Annexe IV avenant n°85 du 19 octobre 2023 relatif à la convergence des régimes de prévoyance [En ligne]. Disponible sur : https://www.legifrance.gouv.fr/conv_coll/id/KALITEXT000048953979/?idConteneur=KALICONT000005635824 [Consulté le : 4 juin 2024] ;
[2] Caisse Autonome de Retraites et de Prévoyance des Vétérinaires. Cotisations et prestations 2024 [En ligne]. Disponible sur : https://www.carpv.fr/wp-content/uploads/2024/01/Livret-2024_Version-janvier-V1.pdf [Consulté le : 4 juin 2024].