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La toxémie de gestation chez la brebis et la chèvre

Adelaïde Baert, docteure vétérinaire, Praticienne hospitalière des animaux de ferme de l'EnvA

Il est toujours surprenant de constater la faculté de la femelle de préserver la vie qu’elle porte en elle au détriment de sa santé, voire parfois même de sa survie ! Chez les ruminants, l’augmentation de la taille de l’utérus dans les dernières semaines de gestation diminue la place pour le rumen. Mais la diminution de la capacité d’ingestion est loin d’être le seul facteur de la toxémie de gestation ! La stéatose hépatique favorise grandement la toxémie. Le risque est d’autant plus grand si la gestation est multiple et que l’état corporel de la mère est excessif ou, au contraire, insuffisant.

Présentation clinique

Premiers symptômes :

Femelle apathique, maladroite, déprimée, anorexique.

Après 24 à 48h :

  • convulsions cloniques, d’abord des muscles cervicaux (elle regarde les étoiles !) puis les autres muscles ;

  • Symptômes nerveux francs : pousser au mur, tourne en rond, amaurose, perte des réflexes... ;

  • Bruxisme ;

  • Œdème des pattes chez la chèvre (origine de ce signe non élucidé).

Après quelques jours : décubitus sternal en position de self-auscultation puis décubitus latéral, coma et mort en l’absence de traitement.

 

Points clés

  1. Toxémie de gestation = Maladie métabolique qui associe une hypoglycémie et une accumulation de corps cétoniques dans le sang dans les deux à six semaines précédant la mise-bas causée par un déséquilibre entre l’apport et le besoin en énergie.
  2. Les signes nerveux sont prédominants lors de toxémie de gestation chez la brebis et la chèvre (contrairement à la cétose chez la vache laitière).
  3. Pour poser le diagnostic, l’anamnèse (femelle en cours de gestation) suffit en règle générale !

 

Chez les brebis et les chèvres, il semble que la gravité de la toxémie de gestation soit principalement liée à l’hypoglycémie. À partir d’un certain stade, les lésions cérébrales engendrées par l’hypoglycémie deviennent irréversibles.

 

Le diagnostic

La suspicion clinique est forte.  Le diagnostic peut être confirmé par la biochimie mais, attention, l'hypoglycémie n'est pas toujours retrouvé. Cependant, une simple bandelette montrant la présence de corps cétoniques permet de confirmer le diagnostic.

 

Le traitement

L'objectif est de rétablir un bilan énergétique correct :

  1. Glucose en IV
  2. Précurseurs du glucose PO
  3. Corticoïdes

Au vu de la dégradation du glucose par la population microbienne ruminale, il est indispensable d’apporter du glucose par voie intra-veineuse pour remonter la glycémie.

Le propylène glycol est un précurseur du glucose. On l’administrera à raison de 100 à 200 ml par jour, par voie orale, en plusieurs fois jusqu’à la reprise correcte de l’appétit.

Enfin, les corticoïdes. D'une part, ils permettent l’augmentation de la glycémie et l’augmentation de l’appétit. Ensuite, ils induisent le part et sont donc le seul moyen d’arrêter le flux permanent de glucose vers l’utérus. Pour la survie des petits, attendre la proximité du terme est le mieux. Certains individus ne répondront pas à l’induction de la parturition. Il conviendra donc de proposer une césarienne en urgence en cas de signes cliniques avancés.

Une hypocalcémie est fréquemment associée à la toxémie de gestation. Cette hypocalcémie peut être à l'origine d'une anorexie et d'une stase ruminale jusqu'à une parésie, un décubitus ou un coma dans les cas les plus graves. Cela justifie l'apport de calcium si la calcémie n'a pas été mesurée.

Une amélioration spectaculaire de l’état de santé de l’animal est souvent observée après césarienne accompagnée des traitements précédemment expliqués.

 

La prévention

Objectif : obtenir une note d’état corporel (NEC) de 3 pour les races laitières et de 2,5 pour les races à viande est recommandée, puis stagnation de cette note au long de la gestation.

  1. Éviter les états corporels excessifs à la mise à la reproduction, ce sont les plus à risque !

  2. Limiter la perte d’état au cours de la gestation. Pour se faire, ne pas oublier que quand l’hiver s’installe, la quantité et la qualité de l’herbe diminuent. Il faut alors complémenter en concentrés et en foin de bonne qualité. De plus, le froid augmente fortement les besoins de l’animal en énergie. Il convient aussi de ne pas oublier le parasitisme, la surveillance des affections intercurrentes ainsi que l’état des dents et des pieds.

Pour les chèvres ou brebis de compagnie à risque Apporter du propylène glycol dans les 15 jours précédant la mise-bas. Malheureusement non appétant, il doit être donné par administration forcée.

Le comptage des fœtus lors d’échographies de gestation permet aussi la mise en lots des brebis et de gérer au mieux l’alimentation durant la gestation. L’évaluation régulière de la NEC est aussi indispensable.

Déclaration de conflit d'intérêt

L’autrice déclare ne présenter aucun conflit d’intérêt qui pourraient influencer ou biaiser de manière inappropriée le contenu de l'article.

Bibliographie

  • ANDREW A. Pregnancy toxaemia in the ewe. In practice. 1997 :19(6) :306-314.
  • DORE V., DUBUC J., BELANGER A. M., BUCZINSKI S. Toxémie de gestation chez la chèvre : suivi des mesures de bêta-hydroxybutyrate (BHB) avant terme à des fins diagnostiques. Journées nationales GTV, 2014, 321-326.
  • LAUR C. Cétose et toxémie de gestation : étude comparée. Thèse de doctorat vétérinaire, Toulouse, 2003. 110 pages.
  • SCOTT, P.R., SARGISSON, N.D., PENNY, C.D. et coll. Cerebrospinal fluid and plasma glucose concentrations of ovine pregnancy toxaemia cases, inappetant ewes and normal ewes during late gestation. British Veterinary Journal, 1995, 151, 39-44.

Mise en ligne le : 24 septembre 2024

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