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Focus sur la toxoplasmose

Annabelle Orszag, docteure vétérinaire formée en ostéopathie, K-taping, cinésiologie, physiothérapie et réadaptation fonctionnelle chez le cheval

La toxoplasmose représente un enjeu sanitaire important à la croisée de la médecine vétérinaire et humaine. Présente dans tous les pays du globe, la séroprévalence mondiale chez le chat avoisine les 40 %. En tant que zoonose à large distribution, elle soulève légitimement des problématiques de santé publique, de bien-être animal et d’impact économique dans certaines filières (notamment chez les petits ruminants).

Toxoplasma gondii, un parasite ubiquitaire

Toxoplasma gondii est un protozoaire, intracellulaire obligatoire, connu pour sa capacité à infecter un large éventail d’espèces animales, dont l’humain.

Les félins (et donc nos chats domestiques) jouent un rôle unique dans le cycle complexe de ce parasite car ce sont ses seuls hôtes définitifs chez qui il peut accomplir la totalité de son cycle biologique, y compris la phase de reproduction sexuée. En revanche, sa diffusion est assurée par des millions d’hôtes intermédiaires (une grande variété de mammifères et d’oiseaux) qui s’infestent essentiellement par ingestion d’oocystes ou de kystes tissulaires.

La toxoplasmose peut se transmettre par :

  • voie alimentaire : consommation de viande crue ou insuffisamment cuite, de fruits ou légumes mal lavés ou d’eau contaminée ;

  • contact direct : manipulation d’objets contaminés (litière, eau…) sans se laver correctement les mains après ;

  • voie transplacentaire : transmission congénitale de la mère à l’embryon, causant des avortements ou des anomalies graves.

Le diagnostic vétérinaire repose sur la sérologie (comparaison des taux d’IgG et d’IgM) mais des tests d’avidité, plus sophistiqués, utiles pour « dater » l’infestation, existent chez l’humain et sont commercialisés pour les animaux dans certains pays européens.

Le traitement de choix reste la clindamycine, associé à une prise en charge symptomatique.

 

Quels enjeux en santé animale ?

Bien que la toxoplasmose soit souvent asymptomatique, l’impact sur la santé animale est loin d’être anodin. Elle peut provoquer des formes graves notamment chez :

  • les ovins et caprins : avortements, mortinatalité et faiblesse néonatale, engendrant des pertes économiques majeures dans les élevages ;

  • les félins : des cas sévères d’encéphalite, de pneumonie ou d’hépatite peuvent survenir ;

  • les chiens : beaucoup plus rare mais on peut observer des symptômes neurologiques, gastro-intestinaux et respiratoires en cas de co-infection ou d’immunodéficience.

Le risque zoonotique est bien réel. L’exposition à T. gondii peut entraîner une infestation subclinique ou des formes graves, notamment chez les femmes enceintes et les personnes immunodéprimées.

Enfin, n’oublions pas la problématique environnementale et écosystémique car la persistance des oocystes dans l’environnement (jusqu’à 18 mois dans le sol) en fait une menace constante pour la faune sauvage, les animaux domestiques et les humains.

 

Points clés

  1. La toxoplasmose illustre le rôle clé des vétérinaires dans la gestion des zoonoses, à l’interface entre la santé animale, humaine et environnementale. L’élimination des déchets vétérinaires, la gestion des excréments de chats et la contamination des ressources en eau sont donc des problématiques interconnectées.
  2. Bien que majoritairement asymptomatique chez le chat, la toxoplasmose peut s’exprimer sous différentes formes localisées et notamment au niveau des yeux. Il est donc judicieux de l’inclure dans le diagnostic différentiel de certains troubles ophtalmiques.
  3. Les ookystes éliminés dans les selles de chat n’étant contaminants qu’après une maturation de 24h, il est recommandé de nettoyer les litières et les surfaces tous les jours.
  4. Compte tenu des enjeux en santé humaine et animale, la vaccination contre la toxoplasmose est un sujet de recherche particulièrement porteur. Trois modalités de vaccination sont à l’étude ; pour l’instant il n’existe qu’un vaccin chez les ovins.

 

Vétérinaire, une profession particulièrement exposée

Les principales sources de contamination incluent la manipulation de chats porteurs ou de leurs excréments, les interventions chirurgicales ou obstétricales sur des animaux infestés et la consommation accidentelle d’aliments contaminés au cours des activités professionnelles.

L’importance du respect des mesures de prévention

Comme on dénombre des cas de toxoplasmose symptomatique chez l’adulte immunocompétent, les conseils de prévention ne doivent pas s’adresser uniquement aux femmes enceintes séronégatives. Par leur expertise, les vétérinaires jouent un rôle central dans cette lutte, en sensibilisant leurs clients, en surveillant les élevages et en adoptant des pratiques exemplaires au quotidien.

Conseils de prévention pour tous :

  • faire cuire la viande ou la congeler au moins 48h à -20°C ;

  • laver les fruits et les légumes avant de les consommer ;

  • porter des gants pour l’entretien de la litière et le jardinage ;

  • se laver consciencieusement et régulièrement les mains à l’eau et au savon.

Conseils spécifiques pour les professionnels de santé animale :

  • une hygiène professionnelle stricte (porter des gants lors des manipulations à risque, se laver les mains après tout contact avec des animaux ou des matériaux biologiques, désinfecter quotidiennement les litières des chats, les surfaces de travail et le matériel pour empêcher la maturation des ookystes) ;

  • une bonne pédagogie envers les propriétaires de chats pour les informer et encourager les bonnes pratiques ;

  • un suivi rigoureux dans les élevages d’ovins, avec élimination sécurisée des produits biologiques issus des animaux infectés et vaccination raisonnée.

Déclaration de conflit d'intérêt

L’autrice de cet article déclare ne présenter aucun conflit d’intérêt qui pourraient influencer ou biaiser de manière inappropriée le contenu de l'article.

Bibliographie

Mise en ligne le : 3 décembre 2024

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