Guillaume Belbis, docteur vétérinaire, Dipl. ECBHM
Les diarrhées des veaux font partie du quotidien du vétérinaire en pratique rurale, notamment en zone allaitante (élevage de bovins pour la viande).
Au cours des dernières années, l’hospitalisation des veaux atteints de diarrhée est un service qui s’est énormément développé. Mais à quoi cela sert ce service concrètement ? Et quelles sont les risques à connaitre ?
La gestion d’un veau à diarrhée nécessite une prise en charge qui doit permettre (entre autres choses) :
De corriger les pertes d’eau durant l’épisode de diarrhée : cela passe par une fluidothérapie réalisable par perfusion et/ou par voie orale.
Pour se faire une idée du volume qui devrait être apporté : si un veau de 50 kg présente une diarrhée importante et présente une déshydratation modérée (par exemple de 7 %), un volume de 8,5 litres de fluides (comprenant correction de la déshydratation, compensation des pertes et couverture du besoin d’entretien) devrait être apporté en perfusion sur 24 heures,
De corriger l’acidose métabolique qui est souvent en cours (même si certains veaux peuvent présenter d’autres troubles métaboliques et hydroélectrolytiques) par l’intermédiaire de la perfusion ;
De corriger l’hypoglycémie fréquemment rencontrée par l’intermédiaire de la perfusion ;
De gérer l’hypothermie qui peut être rencontrée.
La prise en charge du veau peut se faire directement en ferme, mais il n’est pas toujours simple, d’un point de vue pratique de prendre en charge de manière optimale ce jeune patient :
Il n’est pas simple d’apporter de grands volumes de perfusions en ferme (changement des poches par l’éleveur, risque que le cathéter ne passe plus ou s’arrache ou se bouche....) ;
L’estimation des besoins pour corriger l’acidose n’est pas toujours aisée sur la base de l’examen clinique, surtout si le veau a déjà reçu des réhydratants oraux par l’éleveur, avec des risques de mettre en place une correction insuffisante (aboutissant à une guérison plus lente du veau) ou inadaptée ( aboutissant à un apport d’une perfusion inadaptée à l’état du veau avec risque de mortalité associée) ;
La correction de l’hypoglycémie avec un bolus passé rapidement conduit souvent à des effets « rebonds » : une correction avec des apports modérés mais prolongés donne de meilleurs résultats ;
La gestion de l’hypothermie n’est pas toujours aisée (pas de possibilité de mettre sous lampe dans toutes les étables) ;
La gestion des soins d’un veau en diarrhée est très chronophage pour l’éleveur, surtout en période d’épidémie.
Dans ce contexte l’hospitalisation des veaux permet de pallier la plupart de ces problèmes :
Facilité de mise sous perfusion lente avec de gros volumes de perfusion et une correction progressive de l’hypoglycémie, et mise sous lampe chauffante pour gérer l’hypothermie (photo 3, vidéo 1) ;
Possibilité de réaliser des analyses de sang (« gaz sanguins ») permettant d’apporter une fluidothérapie adaptée aux troubles réellement en cours (photo 2) ;
L’éleveur dépose le veau malade et récupère un veau en forme, qui tête (photo 1), avec des soins très limités par la suite (ce qui est en grand de temps pour eux, et un élément faisant que l’hospitalisation des veaux est très appréciée).
Enfin point important : cela permet pour la clinique de limiter les déplacements des vétérinaires et le temps perdu associé, ce qui représente un gain d’efficacité pour la structure.
Si l’hospitalisation des veaux présente de grands avantages pour les vétérinaires et les éleveurs, des problématiques liées au regroupement dans un même lieu d’animaux issus d’élevages différents se posent.
Risques liés à la transmission de germes de diarrhées entre animaux malades
Un frein pour de nombreux éleveurs est le risque que le veau déposé « attrape quelque chose chez le vétérinaire ». Ce risque est réel avec les agents de diarrhée et nécessite une prise en charge spécifique :
Limiter le contact entre les veaux « mufle à mufle » (pose de grille à l’avant des boxes) ;
Limiter le contact avec des fèces issus de veaux malades (conception des écoulements des eaux usées des boxes pour limiter ce contact ; nettoyage et désinfection des boxes après le passage de chaque veau malade, en utilisant un désinfectant actif contre les bactéries, les rotavirus, coronavirus et Cryptosporidium parvum type chlorocrésol ). Cette gestion du risque infectieux par une désinfection est primordiale pour apporter un service de qualité ;
Gérer le matériel avec un nettoyage et une désinfection, et un changement régulier du matériel (tétines de biberon...).
Risques liés aux affections réglementées
En raison des risques liés à l’IBR (Rhinotrachéite Infectieuse Bovine) et à la BVD (Diarrhée Virale Bovine), il convient de n’hospitaliser que des animaux issus d’élevages indemnes, pour limiter le risque qu’un élevage indemne ne contracte l’une des ces infections par contact avec un animal infecté hospitalisé. Notons cependant que ces précautions limitent le risque et ne l’annulent pas. Il faudrait théoriquement tester les animaux hospitalisés puis après leur sortie afin de s’assurer que ces maladies ne se transmettent pas chez les animaux hospitalisés.
L’auteur déclare ne présenter aucun conflit d’intérêt qui pourraient influencer ou biaiser de manière inappropriée le contenu de l'article.
Mise en ligne le : 20 décembre 2024
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