Comment s'est fait le choix de l'école ?
Alors que les questions quant à son avenir professionnel en pédiatrie devenaient de plus en plus prégnantes, Marie a vu passer une publicité pour une formation au métier d’ASV. Un déclic pour elle : pourquoi ne pas s’orienter dans cette voie alors même, qu’étant issue d’un métier du soin, son amour des animaux complète à merveille le socle de cette ambition. Ni une ni deux, Marie se renseigne sur les différentes formations possibles mais aussi, parce qu’à 35 ans passés c’est une question incontournable, sur les possibilités de financement de son projet. De fil en aiguilles, les choses se dessinent. Le financement est trouvé, son dossier accepté, elle intègrera l’ESAV – institut Bonaparte ! Et même si la possibilité de faire financer cette formation a joué un rôle important dans son choix, Marie explique que les différents stages à effectuer durant le cursus et le niveau théorique d’une formation en présentiel ont fini de la convaincre.
Quelles ont été les conséquences de l’écart générationnel avec certains des autres étudiants ?
A l’évocation de ce sujet, les yeux de Marie se sont mis à pétiller ! À tel point, que je me suis surprise à attendre une confidence, peut-être même un secret. Et pour cause, ce mélange de générations qui aurait pu être vécu comme un frein s’est avéré pour Marie être une opportunité inattendue de découvrir cette jeune génération qu’elle ne côtoyait que peu. Alors qu’elle connait bien les enfants (ses patients en pédiatrie étaient des enfants parfois âgés de 18 ans, comme certains de ses camarades de promo, mais qu’elle ne voyait que dans un contexte bien particulier, celui de l’hôpital et de la maladie), Marie n’a que très peu l’occasion de rencontrer des jeunes autour de la vingtaine et, qui plus est, qui viennent de traverser tant bien que mal la crise de la Covid.
Elle découvre une énergie et une toute nouvelle façon d’aborder la vie. Elle apprend que les réalités d’hier ne sont pas celles d’aujourd’hui, que chacun se définit pour lui-même avec cette opportunité de ne plus avoir à tout prix à entrer dans les cases préformatées par la société. Cette liberté identitaire d’une génération qui exprime les choses et fait bouger les lignes.
Alors bien sûr, ce choc des générations a parfois déstabilisé Marie mais elle en sort riche d’apprentissages sociaux que son ouverture d’esprit a rendu possible.
Ce qui, par moment, a tout de même pu agacer Marie, c’est le manque d’implication de certains étudiants. Alors même que pour elle, « rater » n’est pas une option, certains semblent ne pas réaliser que leur nonchalance pourrait les amener à l’échec. Manque de maturité ? Inconscience du coût de la formation, peut être porté par les parents ? Prise de conscience tardive qu’ils ne sont pas où ils devraient et que le métier promis n’est pas celui espéré ? Marie n’explique pas cette attitude de certains et dit d’ailleurs que cela ne l’a pas empêché de profiter au maximum de sa chance d’être là.
Aujourd’hui certifiée, quel bilan tirer de ce parcours ?
Il y a tant à dire. Les ASV sont aujourd’hui formés. Des bases théoriques solides et des compétences techniques réelles et rendues possibles par la partie pratique de la formation ainsi que les stages obligatoires. Des apprentissages validés par le passage d’examens.
Mais Marie apporte ici un éclairage personnel lié à sa double casquette d’infirmière devenue ASV. Elle décrit très bien, et en connaissance de cause, ce qui pour elle fait que les ASV d’aujourd’hui ne pourraient pas, à ses yeux, se prévaloir du titre d’infirmier vétérinaire. La formation d’un infirmier en médecine humaine prend 3 ans. 3 années durant lesquelles les stages obligatoires imposent des passages dans différents services. Des stages qui donnent lieu à des épreuves pratiques évaluées en conditions réelles. Avec au bout du compte un parcours qui donne le droit à l’infirmier d’exercer. L’infirmier est bel et bien responsable de ses actes. Un poids lourd qui repose sur leurs épaules, bien différent de celui qui repose sur celles des ASV qui eux travaillent sous la responsabilité du vétérinaire gérant de la structure. Marie fait bien sûr partie de ceux qui pensent que les ASV devraient pouvoir faire plus mais, que pour cela, il faudrait revoir leur formation afin d’assurer un niveau de compétence uniformisé dans la profession. Elle appuie d’ailleurs cette réflexion sur le fait qu’un étudiant qui ne validerait pas sa formation d’ASV pourrait tout de même trouver un poste en clinique. Et même s’il ne peut pas prétendre à l’échelon 5 de la convention collective d’un point de vue salarial, en pratique sur le terrain, il pourrait travailler comme ASV. Un infirmier non diplômé, lui ne pourrait jamais être embauché.
Je remercie Marie pour cet échange passionnant autour de son parcours de vie qui l’a conduite à devenir ASV.
Propos recueillis par Manuelle Hoornaert
Vétérinaire & Rédactrice en chef